21.5.11

Pour en finir avec le mélo dans le cinéma étudiant

La semaine dernière j'ai assisté à une projection de films étudiants.  Bien que plusieurs fassent preuve d'inventivité et présentent un certain potentiel, j'ai encore une fois vu, comme à chaque projection du genre, ce qui selon moi est le pire cliché du cinéma étudiant, le gros FAIL qui revient encore et toujours : les films mélodramatiques à l'extrême qui sombrent dans le ridicule à force de vouloir toucher à tout prix.  On a souvent l'impression qu'en tournant un histoire d'une tristesse épouvantable on va réussir à faire naître de l'émotion, à créer une oeuvre plus profonde (cherchez pourquoi, triste et profond sont souvent associés dans la tête des gens, mais une oeuvre peut être très brillante tout en étant comique, intrigante, effrayante, etc.).  J'ai donc décidé de décortiquer le mélo étudiant pour démontrer que c'est une erreur du début à la fin.  

ERREUR #1 : LE CHOIX DU SUJET
Choisissez un sujet dont vous avez envie de parler, quelque chose qui vous touche ou vous amuse, quelque chose qui vous attire, vous motive, vous emballe, mais surtout ne choisissez pas en fonction de toucher le public.  Si vous aimez le film que vous tournez, que vous y êtes engagé, ça va paraître et c'est ça qui va rejoindre les gens.  Mettez-y votre personnalité.  Le manque de sincérité n'est jamais payant, si vous essayez trop d'émouvoir à tout prix, ça va paraître aussi et ça ne fonctionnera pas.

ERREUR #2 : L'HISTOIRE
Souvent, elle est absente.  Pour qu'il y ait une histoire, il doit y avoir une «quête», un problème à régler et surtout un personnage qui tente de le régler.  Une fillette qui se fait négliger par sa mère alcoolique, ce n'est pas une histoire, c'est une situation. Pour que ça devienne une histoire, la fillette doit avoir un but précis et poser au moins un geste significatif.

ERREUR #3 : LE PERSONNAGE
Dans ce genre de film, le personnage principal est toujours une victime : grosse erreur.  Ici, il faut voir la différence entre être touché et avoir pitié, le public va être touché par un personnage fort et déterminé qui se tient debout malgré les obstacles, qui fait tout ce qu'il peut pour obtenir ce qu'il désire, jusqu'au bout.  Le public va avoir pitié d'un personnage sans défense qui s'écrase sous tous les malheurs affreux qui lui arrivent mais très rapidement on s'emmerde parce qu'on ne s'attache pas à un personnage qui fait pitié, on n'a pas envie de s'identifier, et rien n'est plus ennuyeux que de suivre un personnage qui sombre dans l'enfer et n'a aucun moyen d'agir pour s'en sortir : aucune tension dramatique.

Une autre erreur dans la construction du personnage : le manque de profondeur.  Indépendamment de la situation qu'il vit, le personnage doit avoir une personnalité.  Dans la vie, nous vivons des conflits internes.  D'un côté, on désire quelque chose, mais d'un autre on désire autre chose.  Nos vaeurs peuvent entrer en conflit les une avec les autres.  C'est la même chose pour le personnage : si tous les choix qu'il a à faire se font en claquant des doigts, c'est parce qu'il est trop unilatéral, et ça c'est plate à mort.  Pourquoi la fille qui se fait battre par son chum ne le laisse pas (pour prendre un exemple typique)?  Parce qu'elle a peur?  Parce qu'elle l'aime encore?  Parce qu'elle ne sait pas où s'en aller?  Dans tous les cas c'est différent, il faut y réfléchir et montrer le dilemme.

ERREUR #4 : LA TRANSMISSION DU MESSAGE
Un film ne devrait pas ressembler à une pub du gouvernement.  Si vous voulez parler des dangers de la drogue, il y a sans doute une façon plus subtile que de montrer un personnage qui fume un joint de pot et «six mois plus tard» il est dans la rue à vendre son corps pour se payer de l'héro.  Disons que c'est  premier degré, c'est un peu comme prendre le spectateur pour un débile léger.  Au lieu de faire la morale, tentez plutôt de soulever la réflexion.  Réfléchissez à votre sujet, élaborez votre opinion personnelle et tentez de mettre en scène une histoire dont la conclusion transmettra votre point de vue.  Si vous pensez que la drogue est dangereuse pour la santé, le film se finira par un personnage qui a un problème de santé à cause de la drogue, sans nécessairement pousser à l'extrême (ex : le perso meurt du SIDA).

ERREUR #5 : LA FIN
Elle doit être significative.  C'est la conclusion du film, c'est elle qui révèle ce qu'il faut comprendre.  Si votre personnage tente de se sortir de l'enfer de la prostitution durant le film et qu'à la fin elle se fait tabasser à mort par son pimp, vous être en train de dire que selon vous se sortir d'une telle situation est impossible.  C'est pourquoi c'est important de ne pas faire une fin dans le seul but de rendre le public triste, il faut absolument penser la chute en fonction de ce qu'on veut exprimer.

De plus, la chute, c'est le résultat d'une ultime action posée en vue d'accomplir la quête.  Arrivé à la chute, c'est la réussite ou l'échec, mais dans un cas ou l'autre, c'est terminé.  On arrive au point ou il n'y a plus rien à ajouter sans recommencer une nouvelle histoire.  On ne peut pas finir au milieu de nulle part parce que sinon votre film n'a pas de conclusion, il ne dit rien.

Je suis loin d'être un expert en la matière et ces conseils ne sont en rien la recette du film parfait, il ne s'agit pas de règle, simplement je pense qu'il vaut la peine de penser à tout ça avant d'écrire son scénario et e se lancer dans une production.  

Personnellement, et ça c'est moi, j'écris le plus souvent sur ce qui m'amuse, j'aime rire en travaillant, donc souvent ça tombe dans le comique.  L'humour, c'est mon moyen de prédilection à moi pour exprimer ce que j'ai à dire, mais il en existe plein d'autres.  Faites donc ce qui vous plaît tant qu'à créer, amusez-vous, écrivez les scènes que vous avez envie de voir, les dialogues que vous avez envie d'entendre, laissez-vous aller et voyez où ça vous mène, ce sera moins monotone tant dans la démarche que dans le résultat.

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